Les associations au cœur de l’innovation en santé

Associations de patients : des mesures en faveur de la démocratie sanitaire 

En matière de santé, le paysage ne cesse d’évoluer. Non seulement les innovations technologiques sont toujours plus importantes, et les associations elles, se transforment et gagnent en représentations auprès des pouvoirs publics. Elles peuvent en effet participer à des actions de groupes et évaluer les médicaments. Passage en revue des dernières actualités qui renforcent notre démocratie sanitaire.

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La première grande évolution, c’est la naissance de l’Union Nationale des Associations Agréées d’usagers du Système de Santé (UNAASS) qui a vu le jour en mars 2017, à la faveur de la loi de modernisation de notre système de Santé de Marisol Touraine. Un bureau transitoire est pour l’heure présidé par Edouard Couty, et prépare l’élection du conseil d’administration autour de huit collèges. Les délégations territoriales de l’Unaass seront quant à elles créées progressivement, et travailleront avec les Agences Régionales de Santé.

Si le CISS comptait une quarantaine d’associations en son sein, 72 associations ont d’ores et déjà signé les statuts de la toute nouvelle Unaass. Cette dernière aura cinq missions :

  • organiser et mieux coordonner la représentation des usagers,
  • rendre des avis aux pouvoirs publics sur les politiques de santé,
  • agir en justice pour défendre ses intérêts et ceux des citoyens,
  • animer un réseau associatif sur l’ensemble du territoire
  • et former les représentants des usagers du système de santé.

Recours dans le domaine de la santé : la prise en compte de la parole des patients

Autant de missions essentielles dans un contexte en perpétuelle transformation. Parmi les récents changements les plus notables, il y a notamment la possibilité pour les associations de familles, de patients et d’usagers d’avoir recours à une action de groupe dans le domaine de la santé. Le décret d’application de la loi Touraine du 26 janvier 2016 est plus qu’une décision législative, c’est une révolution en matière de prise en compte de la parole des patients pour la gestion de la sécurité sanitaire. Les associations de patients sont désormais amenées à jouer un rôle important dans le cadre des actions de groupe en matière de santé, puisqu’elles sont les seules à pouvoir les initier. La nouvelle UNAASS a pour objectif la formation de ses membres afin notamment de consolider la légitimation des éventuelles interventions.

La loi prévoit « l’indemnisation des préjudices corporels subis par plusieurs usagers du système de santé placés dans une situation similaire ou identique ». Précision importante, les préjudices doivent avoir pour cause commune les manquements d’un professionnel de santé et doivent impliquer un produit de santé. Une liste non exhaustive des produits est inscrite dans le Code de la Santé Publique. Le recours à un médiateur pourra être envisagé pour un règlement amiable des litiges…

Sur les traces du développement du médicament…

Il s’agit toutefois de faire preuve de pédagogie et d’expliquer aux patients que le développement thérapeutique est un processus long, compliqué, coûteux… et surtout incertain. Ainsi, sur 10 000 molécules étudiées, environ 100 seront testées en préclinique, 10 feront l’objet d’un développement clinique et une seule deviendra un médicament commercialisé ! De la découverte d’une molécule à sa mise à disposition des patients, le développement d’un médicament peut ainsi prendre jusqu’à une quinzaine d’années et nécessiter des investissements pouvant atteindre un milliard d’euros. Le développement d’un médicament comprend, en effet, deux grandes étapes successives :

  • une phase préclinique qui étudie les effets des molécules d’intérêt thérapeutique sur des modèles animaux. Cette phase vise à analyser finement les aspects toxicologiques et à optimiser les molécules sur le plan chimique.
  • Le développement clinique qui étudie les effets des molécules (ayant passées l’étape du développement préclinique) chez l’Homme : chez des volontaires sains dans un premier temps, puis chez des patients. Ce sont les essais thérapeutiques ou cliniques. Ces procédures sont très strictement encadrées par la loi. Les objectifs sont multiples : assurer avant tout la sécurité d’utilisation du médicament, puis démontrer l’efficacité thérapeutique et déterminer les doses thérapeutiques optimales. Lorsque les essais cliniques sont concluants, une autorisation de mise sur le marché (AMM) est délivrée par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM).

Depuis le 21 novembre 2016, autre nouveauté de taille : les association de patients ou d’usagers, agréée ou non ont la possibilité de participer au processus d’évaluation des médicaments et dispositifs de santé, via un questionnaire en ligne. La liste des produits à évaluer est mise à jour chaque semaine sur le site de la Haute Autorité de Santé (HAS). Objectif pour cette dernière : intégrer l’expérience sur le vécu de la maladie, les traitements existants, les parcours de soins, les besoins,leur savoir spécifique sur leur maladie.. Un premier bilan du dispositif sera réalisé au cours du mois de mai…

En tant qu’utilisateurs finaux, les patients sont, par définition, les premiers concernés par les médicaments et dispositifs médicaux. Pourtant jusqu’ici, paradoxalement, ils étaient trop peu consultés. La HAS évalue chaque année plus de 150 médicaments et une centaine de dispositifs médicaux. Jusqu’à présent, elle établissait des avis à l’aune des études scientifiques et médico-économiques analysées par des groupes d’experts au sein desquels ne figuraient pas systématiquement les représentants des patients. Le 21 novembre dernier, la donne a changé grâce à la mise en place d’un système permettant aux associations de patients de prendre part aux évaluations. « Les patients disposent d’un savoir spécifique : leur expérience du vécu de la maladie, des traitements existants ou du parcours de soins sont autant d’éléments qui peuvent enrichir l’évaluation des produits de santé », expliquait la HAS au moment d’officialiser le nouveau dispositif.

Les patients vont peser plus lourd

En pratique, c’est par le porte-voix des associations de patients que se fera cette participation. Les contributions directement avancées par des patients ou aidants dans une démarche individuelle et isolée ne seront pas acceptées. Les individus désirant communiquer des informations pour une évaluation donnée sont donc invités à travailler avec des associations de patients et d’usagers.
Concrètement, chaque semaine, une liste de produits (médicaments et dispositifs médicaux) à évaluer par les associations de patients est publiée sur le site de la HAS. Mais pas n’importe quel produit…

« Les nouveaux médicaments, ceux déjà pris en charge et qui obtiennent une nouvelle indication ou ceux que la HAS réévalue périodiquement, ainsi que les dispositifs médicaux inscrits sous nom de marque qui présentent un caractère innovant ou qui peuvent avoir un impact sur les dépenses de santé »,

précise la Haute Autorité de Santé.

Outre les médicaments, l’évaluation portera également sur des dispositifs médicaux, terme regroupant divers produits : pansements, lunettes correctrices, préservatifs, thermomètres, stimulateurs cardiaques ou prothèses implantables, pompes à insuline, appareils d’automesure…

« La baisse d’adhésion au traitement s’observe au plan mondial. Nul doute que l’absence de vision partagée est un facteur de non-adhésion des patients. Reconstruire la confiance passe aussi par une plus grande implication des patients, par une information publique de référence commune des autorités de santé et par un langage compréhensible par tous. La mise en place d’un dispositif recueillant l’avis des patients va dans ce sens »,

expliquait Christian Saout, ancien président du CISS (Collectif Interassociatif Sur la Santé), en mai dernier, à l’occasion de la 4ème Journée d’information et d’échanges avec les associations de patients.

Après publication par la HAS, les associations de patients et d’usagers auront un mois pour transmettre leur avis aux experts des commissions responsables des évaluations. Pour cela, ils ont à leur disposition un questionnaire type pour guider et structurer leur contribution. Ce questionnaire est téléchargeable sur le site de la HAS. Les questions portent notamment sur l’impact du traitement sur la vie des patients, sur leurs symptômes et sur leur vécu de la maladie. Toute information éthique, sociétale ou sociale pourra par ailleurs être transmise. Comme nous l’évoquions dans un précédent dossier, ces dernières années, les patients participent davantage aux décisions relatives aux soins. Ces dernières évolutions vont dans le bon sens, d’autant que la plupart des associations de patients demandaient depuis longtemps à être davantage consultées !

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