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Collecte de fonds, comment motiver les donateurs ? volet 2

Avec une hausse de 48 % des dons en ligne entre 2019 et 2021, le digital est devenu un passage obligé.
Pour les associations et fondations, l’argent est le nerf de la guerre, mais la collecte de fonds est loin d’être simple dans un contexte concurrentiel. Sans parler de la baisse des donateurs. Une situation qui oblige à innover. Les explications de Nadège Rodrigues, directrice études et communication chez France générosités et de Lucie Gaudens, directrice de communication de microDON.

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Quelle est la problématique des associations de patients ?

Nadège Rodrigues : En 2021, nous avons mené une étude d'impact en partenariat avec la fondation ARC qui a révélé que la générosité privée représente 39 % des financements de la recherche sur le cancer. C'est considérable. Résultat : au fil des années, les associations ont cherché à améliorer l’efficience de leur stratégie de collecte, dans un contexte toujours plus concurrentiel. Elles cherchent à innover pour être plus proches de leurs donateurs, pour les fidéliser mais aussi et surtout en recruter des nouveaux.

Quelle place occupe aujourd'hui le(s) micro-don(s) dans la générosité des Français et dans le financement associatif ?

Lucie Gaudens : Une place grandissante. Nous en sommes les témoins privilégiés à travers le développement qu'ont connu nos solutions en particulier ces trois dernières années…
Les chiffres probants des collectes en témoignent. Depuis sa création, microDON a collecté plus de 50 000 000 € au profit de milliers d'associations.
Ce qui était une nouvelle source de financement il y a encore quelques années est en passe de devenir un mode de collecte incontournable. C'est une alternative supplémentaire aux formes de générosité traditionnelles.
Ce succès s'appuie sur plusieurs paramètres : la simplicité, la rapidité et l'accessibilité de la démarche.
On parle de quelques centimes d'euros, ce qui reste accessible au plus grand nombre.

NR : Les dernières données de notre Baromètre de la générosité concernent l'année 2021 sur la base des informations de collecte transmises par 56 fondations et associations membres, pour un montant global de près d'un milliard d'euros pour l’année 2021.
Nous avons constaté une augmentation globale des dons de l'ordre de 4,5 % en 2021 par rapport à 2020.
Autre constat : le montant moyen des dons des particuliers augmente. Pour autant, dans le même temps, le nombre de dons quant à lui baisse.
Nous avons pu également mettre en évidence une baisse de 9 % des nouveaux donateurs entre 2011 et 2021.

Comment aidez-vous les associations ?

NR : France générosités est un syndicat professionnel regroupant 136 fondations et associations, qui observe les évolutions de la générosité du public depuis 25 ans. Nous défendons les intérêts des associations et fondations faisant appel à la générosité du public, afin d’installer un environnement réglementaire favorable au développement du secteur. Notre syndicat les aide à mieux comprendre les composantes de la générosité et ses évolutions, à mieux appréhender les nouvelles tendances, notamment au travers d'enquêtes et d’études thématiques.
L'accompagnement se veut également juridique, fiscal mais aussi technique, afin notamment de mieux intégrer le numérique à la collecte. Les associations n’ont pas toutes la même maîtrise du sujet. La cryptomonnaie et les NFT, Non Fongible Token1 font aujourd'hui partie des thématiques que nous étudions pour analyser comment les associations/fondations pourraient s'en emparer pleinement tout en appliquant les garde-fous nécessaires. Il ne faut pas oublier que nous sommes un secteur très encadré, régulièrement contrôlé - et c'est normal.
D'ailleurs, c’est sur cette obligation règlementaire et morale de rendre des comptes que repose toute la confiance de nos donateurs. Ce pacte de confiance avec les Français et l'État, est le socle de notre fonctionnement. Lorsqu’une personne fait un don, il est important qu'elle sache à quoi il a concrètement servi. L'association se doit d'expliquer, de montrer, de donner à voir, d'avancer des éléments de preuve.
Enfin, nous favorisons aussi le partage des bonnes pratiques entre nos membres dans une logique de réseau. La concurrence n'empêche pas la solidarité entre associations/fondations.

LG : Nous les aidons de façon indirecte. Nous accompagnons et convainquons un maximum d’enseignes et entreprises de mettre en place nos solutions au profit d’associations. Parmi ces solutions, L’ARRONDI solidaire en caisse permettant aux clients qui s'apprêtent à payer leurs courses/achats d'arrondir s’ils le souhaitent leur ticket de caisse à l'euro supérieur. La différence en centimes d'euros sera reversée à l'une des associations partenaires du magasin en question. Ce dispositif, mis en place en 2013, est aujourd'hui porté par 12 000 magasins en France (comme Franprix, Maisons du monde, Naturalia, Truffaut…). 2

Il faut donc séduire de nouveaux donateurs ?

NR : Oui, encore faut-il bien les identifier. Cela suppose de connaître leurs centres d'intérêts, leurs profils, les supports d'informations et les moyens de communication qu'ils plébiscitent… afin d'être en phase avec eux.
Voilà pourquoi le nouveau module "vision donateur" de notre baromètre est très intéressant pour le secteur associatif. Il permet d’établir des profils types et d’observer les évolutions des comportements. Non seulement les donateurs historiques sont nombreux, et en plus ils vieillissent, avec un âge médian de 62 ans. Ce paramètre est d'autant plus important à prendre en compte que ces donateurs sont ce qu'on appelle des "multi-donateurs".
Autrement dit, ils donnent à plusieurs associations.

LG : Oui, et les dispositifs de micro-dons y participent.
C’est un type de collecte en phase avec les modes de vie d'une génération qui privilégie la spontanéité et une générosité plus ponctuelle. Le micro-don permet ainsi d'activer le levier de la sensibilisation auprès d’un nouveau public, souvent plus jeune, peu habitué à donner jusque-là mais pourtant volontaire.

Les nouvelles générations sont-elles moins généreuses ?

NR : Plusieurs facteurs comme la baisse du pouvoir d'achat, la sursollicitation, des préoccupations plus individuelles pourraient être avancées mais il ne s'agit que de suppositions sans fondements concrets. Il faut prendre en compte les évolutions sociétales et les changements de comportement.
Plus qu'à une association ou à une marque, les jeunes apportent leur soutien à une cause et une seule.

LG : Les nouvelles générations font en tout cas bouger la générosité !
Leurs fortes attentes en matière d’engagement et de sens au travail ont notamment amené bon nombre d’entreprises à développer ou renforcer leurs pratiques de générosité. On a vu ainsi émerger ces dernières années des formes de générosité plurielles avec une « normalisation » du don en entreprise où se multiplient les opportunités de s’engager : mécénat de compétences, congés solidaires, collecte de dons en nature, don sur salaire… avec des salariés plus enclins à participer. Une prise de conscience collective, qui s’est accentuée depuis la crise sanitaire, durant laquelle la notion de solidarité a revêtu une importance toute particulière. Les employés et particulièrement les plus jeunes estiment de plus en plus qu’il est crucial que leur employeur leur permettent de se sentir utiles aux autres.

Comment une association doit-elle se positionner pour promouvoir vos solutions de micro-dons auprès des entreprises et enseignes ?

LG : a marge de manœuvre des associations est limitée.
En effet, les dispositifs s'adressent en premier lieu aux entreprises et enseignes. Ce sont ces dernières qui sélectionnent les associations bénéficiaires. Plusieurs cas de figure se posent : soit l'association est déjà partenaire de l'entreprise/enseigne et la mise en place du micro don est l'occasion pour l'entreprise de renforcer ce partenariat; soit il s'agit d'une première collaboration. Dans ce cas, l'association se voit informée qu'elle est bénéficiaire de l'arrondi sur salaire d'une entreprise ou de l'arrondi en caisse au sein d'une enseigne.
Certaines associations qui jouissent d'un réseau performant, prennent le parti de solliciter des entreprises et enseignes avec qui elles sont déjà en relation pour les inviter à adopter nos solutions de don à leur profit. Si l’entreprise ou l’enseigne répond à nos critères de sélection (entreprise de plus de 200 salariés et enseignes de plus de 15 points de vente) et se montre intéressée, alors nos équipes peuvent aux côtés de l’association intervenir pour présenter la solution, lever les éventuels freins techniques et la convaincre de mettre en place le dispositif à son profit.

En matière de générosité, certains secteurs sont-ils plus « porteurs » que d’autres ?

NR : Un sondage annuel réalisé en partenariat avec l'IFOP, sur un échantillon de 4 000 personnes représentatives de la population française, s'intéresse aux causes préférées ou prioritaires des Français.
La première est la protection de l'enfance. Une première place observée depuis 2012.
En 2022, elle se retrouve ex-aequo avec la cause de la protection animale - qui n'était en 2019 qu'à la 7e place. Les jeunes générations y accordent un réel intérêt, ce qui explique aussi sa croissance. La lutte contre l'exclusion et la pauvreté se classe en troisième position tandis que l'aide aux personnes âgées arrive en quatrième place. Le soutien à la recherche médicale se classe en cinquième position sur 18. En 2020, crise de la Covid-19 oblige, elle s'était hissée à la troisième place. Toujours pour ce qui concerne le secteur sanitaire, la 10e place est occupée par l'aide aux personnes malades et à leurs familles.

Pour séduire les plus jeunes, le recours au digital est-il incontournable ?

NR : C'est incontestable. En 2019, la part du digital dans la collecte en don ponctuel était de 19 %. Elle est passée à 25 % deux ans plus tard.
Derrière cette accélération, il faut d'abord voir le développement du don en ligne (via les boutons placés sur les sites Internet des associations et fondations). Cette option est un minimum.
La croissance du digital s'explique, par ailleurs, par l'explosion des réseaux sociaux où les associations sont de plus en plus présentes, que ce soit sur Instagram, Facebook, Twitter, YouTube ou encore Tiktok.
En 2021, la part du recrutement effectué en ligne représentait ainsi 21% contre 10% en 2017. D'autres outils en ligne sont utilisés, à commencer par les cagnottes en ligne ou les dons par sms.

Quid de la communauté des gamers ?

NR : Les Z-Events permettent de mobiliser cette communauté qui représente une véritable « vague ». En 2022, le Z-Event très médiatisé a permis de collecter 10 millions d'euros. Sur le même principe, les associations/fondations créent des challenges entre gamers en ligne pour soutenir leur cause. En clair, elles vont là où sont les donateurs potentiels.

Elles donnent de leur salaire… et de leur temps !

En matière d’engagement solidaire et de mécénat de compétences, force est de constater que l’entreprise microDON montre l’exemple. Elle en a même fait un volet de sa politique RH puisque – au-delà de l’arrondi sur salaire mis en place par l’entreprise – tous les salariés bénéficient de 5 jours par an pour donner de leur temps à des associations. Magali et Samira peuvent en témoigner.

 

La première, chargée de marketing chez microDON, a accompagné Samira en reconversion professionnelle, pendant 6 mois dans le cadre de la mission « Devenez mentor.e », proposée par l’association Social Builder.

Au programme : organisation d’entretiens d’embauche fictifs avec des datas analysts, aide à la rédaction de publications sur LinkedIn, benchmark de sites d’emplois spécialisés, conseils et surtout beaucoup d’écoute et de soutien pour l’encourager. L’engagement s’est avéré payant puisque, la jeune femme a décroché un poste en CDI en tant que Data Analyst au sein de l’entreprise…microDON !

 

Ellie, chargée de communication, s’est, quant à elle, investie auprès d’Aviation Sans Frontières, une association qui assure le transport de jeunes enfants en attente d’opérations cardiaques. Une manière de poursuivre, à titre individuel, l’engagement solidaire de son employeur mais aussi de donner suite à plusieurs expériences bénévoles  (collectes des Restos du Cœur, clean walks dans les calanques…).

 

L’occasion aussi d’œuvrer aux côtés de sa mère, également bénévole au sein d’Aviation Sans Frontières. En fonction de ses contraintes et disponibilités, elle participe à des missions d’accompagnement, en avion, d’enfants atteints de maladies cardiaques. « Il s’agit donc soit d’aller les chercher dans leur pays d’origine, principalement en Afrique, pour les ramener en France où ils seront opérés, soit de les ramener chez eux, une fois guéris. Parfois on fait les deux » , explique-t-elle.

 

Chez l’Oréal, l’engagement solidaire de certains collaborateurs ne s’arrête pas non plus au micro don sur salaire. Plusieurs d’entre eux ont répondu favorablement à l’initiative Citizen contre le Covid : un programme spécifique de télé-bénévolat menée en partenariat avec Unis-Cité et des dispositifs de crowdfunding ciblés comme les Paniers Solidaires. « Il nous a semblé important de permettre à nos collaborateurs qui le souhaitent d’aller plus loin dans leur mobilisation solidaire et généreuse en proposant un volet engagement et mobilisation au côté du dispositif déjà existant de don sur salaire. Avec l’équipe microDON nous avons pu très rapidement mettre en place l’initiative Citizen contre le Covid » , explique Erwan Noël, chargé de mission à la Direction RSE de L’Oréal.

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1. Un objet non fongible est un objet unique qui n'est pas interchangeable. L'argent est fongible, au sens où on peut échanger des euros ou des crypto-monnaies, mais une œuvre d'art ne l’est pas, car unique. Autrement dit, un NFT désigne un fichier numérique auquel un certificat d'authenticité numérique a été attaché. Ce jeton cryptographique est stocké sur une blockchain.

2. Donner quelques centimes à quelques euros à une association de façon simple et indolore tout en payant par carte bancaire ses achats en ligne ou en magasin : c'est le principe de l'arrondi. Pour les entreprises/enseignes qui souhaitent déployer la procédure au sein de leur(s) magasin(s) et engager leurs clients à répondre positivement à cette démarche solidaire, il existe un site pour tout comprendre : www.larrondi.org. En ligne, l'enseigne peut simuler son potentiel de collecte au profit d'une association d'intérêt général et, de façon plus globale, bénéficier d'une démonstration personnalisée par les experts de la plateforme. L'occasion de mieux appréhender les différentes étapes pour mettre en place et développer le don en caisse.

M-FR- 00008305 - V1.0 - Établi en Mars 2023

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